Un potentiel de la taille du Luxembourg à solariser en France !
La transition énergétique du secteur tertiaire est en marche. Plus de 970 millions de m² de surfaces tertiaires sont concernées par le "Dispositif Éco Énergie Tertiaire", mieux connu sous la dénomination Décret Tertiaire. Par ce mécanisme, la France s’engage dans une transformation ambitieuse et progressive de ses bâtiments à usage tertiaire.
Issu de l’article 175 de la loi ELAN (LOI n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique), le Décret Tertiaire impose aux propriétaires et exploitants de bâtiments tertiaires de mettre en place des actions concrètes pour réduire progressivement leur consommation d’énergie finale. Cette réglementation marque un tournant décisif pour la performance énergétique des bâtiments professionnels, avec des échéances claires et des objectifs chiffrés.
Responsable de 17% de la consommation d’énergie finale en France, le secteur tertiaire représente un levier stratégique pour atteindre les objectifs climatiques de la France et réduire sa dépendance énergétique. Ce décret vise à :
Réduire drastiquement la consommation énergétique finale des bureaux, commerces, hôtels, établissements de santé, établissements scolaires, équipements sportifs, plateformes logistiques, et bien d'autres infrastructures tertiaires.
Diminuer les émissions de gaz à effet de serre, en parfaite adéquation avec les engagements nationaux et européens en matière de transition écologique et de neutralité carbone.
Inciter à la rénovation et à l’optimisation énergétique des bâtiments existants afin d’améliorer leur efficacité, réduire les coûts d’exploitation et accroître leur attractivité.
Avec près d’un milliard de m² concernés, les bâtiments tertiaires en France constituent un potentiel considérable à solariser et à réinventer. L’intégration des énergies renouvelables, notamment photovoltaïque en autoconsommation, combinée à des solutions de rénovation thermique et d’optimisation énergétique, ouvre la voie à une transformation profonde du parc immobilier.

Dispositifs mis en place par le Décret Tertiaire
1. Visant à réduire drastiquement la consommation d’énergie finale des bâtiments tertiaires d’ici à 2050, le Dispositif Éco Énergie Tertiaire fixe trois paliers progressif de réduction. Les obligations sont fixées en pourcentage de réduction de la consommation énergétique par rapport à une année de référence qui ne peut être antérieure à 2010 (au choix du propriétaire). Pour les bâtiments existants entre 2010 et 2019, l'objectif est :
-40 % de consommation d'énergie finale en 2030
-50 % de consommation d'énergie finale en 2040
-60 % de consommation d'énergie finale en 2050
Pour les bâtiments neufs, cet objectif sera mesuré en fonction de l’atteinte d’un seuil de consommation énergétique, fixé en fonction des usages et des performances des bâtiments neufs comparables. Un arrêté ministériel est attendu sur ce sujet.
2. Un niveau de consommation maximale d'énergie finale est également fixé en valeur absolue, exprimé, en kWh/m2/an de surface de consommation énergétique, et dont le seuil est fixé, par catégorie d’activité, et par zone climatique par l’arrêté du 13 avril 2022 (annexe II).
Près de 68 % du parc tertiaire est concerné.
3. L’obligation de réduction de la consommation d’énergie finale vise tous les bâtiments ou parties de bâtiments à usage tertiaire de plus de 1 000 m².
Entrent dans le champ de cette législation :
« Tout bâtiment hébergeant exclusivement des activités tertiaires sur une surface de plancher supérieure ou égale à 1 000 m2 ; les surfaces de plancher consacrées, le cas échéant, à des activités non tertiaires accessoires aux activités tertiaires sont prises en compte pour l'assujettissement à l'obligation ;
Toutes parties d'un bâtiment à usage mixte qui hébergent des activités tertiaires sur une surface de plancher cumulée supérieure ou égale à 1 000 m2 ;
Tout ensemble de bâtiments situés sur une même unité foncière ou sur un même site dès lors que ces bâtiments hébergent des activités tertiaires sur une surface de plancher cumulée supérieure ou égale à 1 000 m2. »
En plus de son large champ d'application, il est particulièrement difficile de s’affranchir de cette obligation :
Cette obligation demeure pour les bâtiments concernés : même si la surface des activités tertiaires descend sous le seuil de 1 000 m² après l'arrêt de certaines activités, les propriétaires et locataires restants ou nouveaux restent soumis à cette contrainte.
Les propriétaires et les preneurs à bail sont tous les deux responsables de l’application des obligations découlant du décret tertiaire.
Avec tant de bâtiments tertiaires concernés, le décret tertiaire donne des pistes aux propriétaires et locataires pour atteindre ses objectifs.

Comment calculer sa consommation d’énergie finale ?
L’arrêté du 10 avril 2020 relatif aux obligations d'actions de réduction des consommations d'énergie finale dans des bâtiments à usage tertiaire, aussi appelé « arrêté méthode », fournit une liste de définitions nécessaires à la compréhension du Dispositif Éco Énergie Tertiaire. Parmi celles-ci, on retrouve la définition d’ « énergie finale ».
« doit être entendu comme étant [...] l’énergie finale, l'énergie délivrée au consommateur final. La conversion en kilowattheures d'énergie finale des énergies relevées ou facturées s'effectue selon les modalités présentées en Annexe I du présent arrêté. Les consommations d'énergie finale prises en considération sont celles des postes de consommations énergétiques relatifs d'une part à l'ambiance thermique générale et à la ventilation des locaux, en tenant compte des modalités d'occupation, et d'autre part aux autres usages immobiliers ainsi qu'aux usages spécifiques et de procédés. »
De cette définition, on comprend que la réduction de consommation d’énergie finale entendue correspond à la réduction de la consommation d’énergie soutirée au réseau, achetée auprès d’un fournisseur.
Cette définition implique que la réduction de la consommation d’énergie finale se rapporte uniquement à la diminution de l’énergie prélevée sur le réseau et achetée auprès d’un fournisseur. Par conséquent, l’autoconsommation d’énergie renouvelable n’est pas intégrée dans ce calcul. Ainsi, la part d’électricité photovoltaïque autoconsommée contribue efficacement à atteindre les objectifs réglementaires, puisque elle vient directement réduire le calcul de l’énergie finale.

Suivi orchestré par l'ADEME
L’ADEME est chargée de superviser le respect des objectifs de réduction de la consommation d’énergie finale. Chaque année, les propriétaires et locataires concernés doivent déclarer leurs consommations sur la plateforme numérique OPERAT, où un "score Éco-énergie tertiaire" leur est attribué en fonction des performances atteintes.
Ces objectifs ne sont pas simplement indicatifs : leur non-respect entraîne des sanctions. Après une mise en demeure et un rappel des obligations, des amendes pouvant atteindre 7 500 € par bâtiment peuvent être appliquées. Par ailleurs, un mécanisme de "Name and Shame" est prévu : la liste des bâtiments ne respectant pas leurs engagements sera publiquement diffusée, exposant ainsi les entreprises et propriétaires défaillants à une pression réputationnelle.
Les sanctions restent relativement limitées en termes de dissuasion. L’efficacité du dispositif repose avant tout sur l'incitation économique, en mettant en avant les économies d’énergie potentielles que les entreprises peuvent réaliser.
Pour éviter ces sanctions, le Décret Tertiaire oriente les entreprises vers quatre leviers d’action concrets :
Rénovation énergétique du bâtiment
Optimisation des équipements techniques
Gestion intelligente de l’énergie
L’autoconsommation d’énergie renouvelable
L’autoconsommation d’énergie renouvelable présente un triple avantage : elle permet de répondre aux obligations du Dispositif Éco Énergie Tertiaire, de réduire significativement la facture énergétique et de générer des revenus supplémentaires grâce à la vente des excédents non consommés. Pour les entreprises du tertiaire disposant d’un foncier exploitable et confrontées à des coûts énergétiques élevés, elle s’impose comme un choix stratégique incontournable.

Recourir à l’autoconsommation dans le cadre du Décret Tertiaire
"L’autoconsommation peut se définir comme le fait de consommer sa propre production d’électricité. Elle est associée à la notion d’autoproduction, qui est le fait de produire sa propre consommation", d'après le Ministère de la Transition écologique.
Il existe deux types d’autoconsommation en matière de photovoltaïque :
Autoconsommation individuelle (ACI) : elle repose sur la production d’électricité via des panneaux photovoltaïques couplés à un onduleur qui convertit le courant continu en courant alternatif. L’énergie produite est consommée en instantané, stockée dans des batteries ou injectée sur le réseau, en cas de surplus. Un système de pilotage intelligent peut optimiser l’usage en fonction des besoins et de la production.
Autoconsommation collective (ACC) : elle implique plusieurs consommateurs partageant une même production locale d’énergie renouvelable. L’électricité est distribuée via le réseau public ou un microgrid privé. Un algorithme de répartition attribue l’énergie produite en fonction de coefficients de partage définis entre les participants. Des compteurs communicants mesurent les flux pour assurer une répartition précise et une facturation adaptée. Le cadre règlementaire de ces opérations est plus étoffé.
Pour réduire sa consommation d’énergie finale, le Décret Tertiaire impose également que les changements mis en place ne soient pas à l’origine d’une augmentation des émissions de gaz à effet de serre. Dans ce cadre, l’utilisation d’énergie autoconsommée n’est pas non plus comptabilisée dans le comptage des émissions de gaz à effet de serre du bâtiment.
Le triple avantage de l'autoconsommation et son rôle dans le Décret Tertiaire
L’autoconsommation réduit la quantité d’énergie finale soutirée du réseau et achetée auprès d’un fournisseur d’énergie, contribuant ainsi à diminuer les coûts énergétiques des entreprises. En parallèle, elle constitue une source de revenus, puisque l’excédent de production non consommé peut être revendu, notamment à EDF via le dispositif d’Obligation d’Achat.
Recourir à l'autoconsommation dans le cadre du Décret Tertiaire est aussi un moyen de se conformer aux nouvelles obligations de solarisation des bâtiments, en application de la loi APER, de 2023. |
Toutefois, dans le cadre du Décret Tertiaire, l’objectif principal n’est pas la revente de surplus, car l’énergie vendue ne compte pas comme une réduction de consommation. Pour maximiser les bénéfices du dispositif, il est essentiel que les gestionnaires évaluent précisément leur production potentielle en fonction de leurs besoins énergétiques et des exigences du Décret Tertiaire. Un dimensionnement optimal de l’installation photovoltaïque garantira un taux d’autoconsommation élevé et une conformité réglementaire efficace.
En termes pratiques :
Installer un système photovoltaïque en autoconsommation nécessite notamment :
Une surface disponible sur toiture, ombrière ou plus rarement au sol ;
Un dimensionnement optimal pour maximiser l’autoconsommation ;
Un raccordement au tableau électrique du bâtiment ;
Éventuellement un système de stockage si le site fonctionne hors horaires ensoleillés.
Les contraintes liées à l’autoconsommation varient selon le type de foncier, de bâtiments et les besoins énergétiques identifiés : il s'agit donc d’évaluer la pertinence et la rentabilité du projet. Solaire Conseil accompagne les dirigeants d’entreprise dans cette démarche et propose un diagnostic de la faisabilité, un dimensionnement optimal de l’installation et une stratégie adaptée pour maximiser l’autoconsommation, tout en assurant la conformité du projet avec le Décret Tertiaire.

Rentabilité de l’autoconsommation pour un bâtiment tertiaire
Dans le cadre des obligations du Dispositif Éco Énergie Tertiaire, l’optimisation d’une installation photovoltaïque en autoconsommation peut se piloter grâce à deux principaux indicateurs :
Le taux d’autoconsommation
Il est le rapport entre l'énergie produite et directement consommée sur place par rapport à la production totale. Il se calcule en divisant l'électricité utilisée instantanément par l'installation, par l'électricité totale produite.

Plus ce taux est élevé, moins il y a d'injection sur le réseau, ce qui permet de réduire la consommation d’énergie finale au sens du décret tertiaire.
Le taux d’autoconsommation moyen se situe entre 50% et 80% pour un bâtiment tertiaire bien optimisé. Mais suivant le secteur d’activité ce taux peut évoluer fortement, y compris au sein du secteur tertiaire. Pour des bureaux climatisés, ce taux peut se situer autour de 60%, alors que pour des bâtiments comme les grandes surfaces avec des charges frigorifiques importantes ce taux est bien plus élevé (90 à 100%).
C’est la synchronisation des besoins du bâtiment avec la production solaire qui permet d'augmenter ce taux.
En France, en moyenne, la production des panneaux atteint son pic entre 10h et 16h.
Le taux d’autoproduction ou autosuffisance
Le taux d'autoproduction (ou autosuffisance) est le rapport entre l'énergie produite localement et l'énergie totale consommée sur place. Il se calcule en divisant l'électricité produite par une installation, par la consommation totale consommée sur le site.

Plus ce taux est élevé, plus le site couvre ses besoins énergétiques avec sa propre production, réduisant ainsi sa dépendance au réseau.
En moyenne le taux d’autoproduction pour un bâtiment tertiaire se situe entre 20% et 40%. Cela équivaut de fait à une réduction proportionnelle de la consommation d’énergie provenant de son fournisseur, et, par conséquent, de sa facture d’énergie.
C’est le dimensionnement de l’installation, c’est-à-dire l’adaptation de sa puissance en fonction des besoins du bâtiments, qui permet d’optimiser ce taux.
Ces données doivent être modélisées avant d’envisager l’installation de panneaux photovoltaïque en autoconsommation. Leur optimisation est nécessaire pour répondre aux critères du Décret Tertiaire en n’injectant pas la grande majorité de la production électrique sur le réseau car la consommation ne rencontre pas forcément la production.
De manière plus concrète, voici une modélisation économique simplifiée d’un projet d’autoconsommation sur la toiture d’un supermarché :
Projet d’autoconsommation d’un supermarché
Surface : 1.500m2 | Consommation annuelle : 675.000kWh |
Taux de couverture de la toiture : 85% | Puissance installée : 337kWc |
Coût de l’installation : 350.000€ | Production annuelle : 135.000kWh |
Taux d’autoproduction : 20% | Taux d’autoconsommation : 95% |
Économies annuelles : 27.000€ (0,20€ d’économie/kWc) | Revenus issus de la vente de surplus : 710,1€ (6750 kWh x 0,1052) |
Durée d’amortissement : 12,6 ans | Revenus annuels : 27710,1€ |

Cet exemple permet de rendre compte de la rentabilité à long terme d’une installation photovoltaïque en autoconsommation.
Plusieurs variables sont, néanmoins, à prendre en compte :
La localisation du bâtiment : l’ensoleillement est variable en France, et même si une installation est rentable au nord de la France, une installation au sud produira plus d’énergie, et son TRI (taux de rendement interne) sera plus performant.
Les besoins énergétiques du bâtiment : la saisonnalité et la périodicité des besoins est une variable cruciale pour bien anticiper le dimensionnement de l’installation. Les périodes les plus propices sont l’été et le milieu de journée (10h-16h), ce qui correspond bien aux besoins en terme de réfrigération, congélation, climatisation d'un supermarché.
La fiscalité : nouveauté du budget 2025, les opérations d’autoconsommation collective, à l’instar de l’autoconsommation individuelle déjà exonérée, ne sont désormais plus soumises à l’accise sur l’électricité pour les installations d’une puissance inférieure ou égale à 1 MWc. Pour rappel, anciennement appelée CSPE, l'accise sur l'électricité est une taxe payée par tous les consommateurs finals d'électricité.
Les subventions : nombres de subventions existent et à tous les niveaux. Il faut néanmoins veiller à leur comptabilité avec les dispositifs en place. Pour en savoir plus, consultez notre article dédié.
Encore bien d’autres modalités sont à prendre en compte telles que le financement de l’installation (crédit / fonds propres / financement de projet), le type de panneaux choisis (productivité, durée de vie, …), le type d’autoconsommation choisi (l’autoconsommation entraine d’autres frais liés à la gestion de l’opération et à l’utilisation du réseau public), …
Peut-on mutualiser les obligations du décret tertiaire et les obligations solarisation des bâtiments et parkings ?
Les bâtiments et les parkings commencent à se voir appliquer une obligation de solarisation (ou de végétalisation) issue de la Loi APER de 2023 et de son décret d'application de décembre 2024.
Les bâtiments visés devront être couverts de panneaux photovoltaïques et les parkings visés devront être recouverts d'ombrières incluant un procédé de production d'énergie renouvelable.
Pour rappel, ces obligations entrent en vigueur :
Pour les parkings extérieurs : dès juillet 2026, tous les parcs de stationnement de plus de 10.000m2 devront couvrir 50% de leur surface d’ombrières. Pour les parcs de plus de 1500m2, cette règle s’appliquera en juillet 2028.
Pour les bâtiments neufs, qui ont subis une rénovation ou une extension : depuis janvier 2025, tous les bâtiments tertiaires de plus de 500m2 doivent au moins avoir couvert 30% de leur surface. Ce taux de couverture évoluera en juillet 2026 pour passer à 40%, puis en juillet 2027 à 50%.
Pour les bâtiments existants : l’obligation interviendra en janvier 2028, le taux de couverture n’est pas encore défini. Un décret, à paraître, viendra préciser le régime de cette obligation.
Avec toutes ces nouvelles obligations, l’installation de panneaux photovoltaïques en autoconsommation pour répondre aux obligations du Dispositif Éco Énergie Tertiaire est une opportunité de se conformer aux contraintes de solarisation des bâtiments.
Une synergie entre les projets est donc possible. L'effort peut être mutualisé :
Couvrir le toit du bâtiment et le parking d'ombrières devient une obligation à laquelle il va falloir se conformer
Autoconsommer l'électricité produite par les panneaux sur le toit et les ombrières permet de satisfaire à l'obligation de réduction de la consommation d'énergie finale au sens du décret tertiaire.
Solaire Conseil est votre guichet unique pour vous aider à conduire la réalisation de votre projet d’autoconsommation : étude de faisabilité, étude d’opportunité, études techniques, modèles économiques, simulations financières, contractualisation, conformité aux réglementations, (etc.).
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